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Octobre 2020

Journal de Bord, MFM octobre 2020
Dans le lit, soleil timide dehors.

Ces deux semaines, nous nous sommes habillés de lumière. Nous sommes à Moulins, dans la salle ou l’on va jouer nos premières. Juju (Juliette) nous accompagne et c’est elle qui fait la création lumière. Quel taff, et ce n’est pas un cadeau que je lui file...La lumière dans un spectacle de mario est vraiment essentielle. Là, non seulement, y a 4 mario plus moi à éclairer, mais tout un décor que je finis par chambouler généreusement... Ce qui signifie, aucune source lumineuse à accrocher dans le décor. Mes espaces de jeu sont parfois ciblés avec des angles de planches qui font des ombres sur le visage...et puis, j’investis le plateau en entier.

On enregistre les voix off dans une salle à part. Le résultat ne me plaît pas, mais j’ai décidé de lacher prise là dessus. On fera ça mieux après. Un copain à Juju passe pour au moins refaire les niveaux de son, et nettoyer les bande son.

Fred vient (re) travailler sur le décor le weekend. Je me sens tellement bien dans ce décor. Elle a vraiment compris (et amélioré) ce que j’avais en tête. Je suis très heureuse de ce décor, et plus encore, de l’avoir rencontré...

Juju et moi, on prend un jour de pause pendant que Mapie va bosser ailleurs. J’en profite pour aller chercher mes petits cadeaux de première. Vieille tradition théâtrale que de s’offrir dans l’équipe de petits cadeaux pour se souhaiter bonne chance, et merci.

Je vois pendant ces 2 semaines toutes les petites choses qu’il reste à faire...Je passe du temps à essayer d’organiser ces places, ces fameuses précieuses places. La jauge est restreinte à 25. Je dois acheter un journal, des punaises, ramener du tissu, coudre la couverture des petits, écrire les tracts, répondre aux mails, trouver une vieille lavette, rappeler Alex pour de menus détails, prévenir Bruno… Je n’arrive pas à délèguer , c’est vraiment un travail que je dois faire sur moi. Le lacher prise.
J’aimerai tellement en faire plus ; avoir le temps de manipuler, revoir les regards des mario, leurs voix, mes changements de mains, fignoler le texte, les intentions... J’aimerai travailler plus certains détails, prendre le temps de me poser à côté de Juju et voire les lumières scène après scène.

Hier, j’ai tout de même pris le temps de me mettre en extérieur plateau et de regarder certains tableaux lumineux. C’est très beau. Alex est venue avec son fiston assister à un filage. Elle nous a dit que la lumière etait un vrai soutien pour la compréhension de l’histoire, qu’elle se sentait accompagnée avec. Je pense que ça a du rassurer Juju.

Mapie continue de m’encourager, et de me faire de précieux retours. Elle est toujours juste, elle capte les moments ou j’ai besoin d’un peu de nourriture de jeu, elle sait les nommer et me donne des pistes de jeu . Aujourd’hui, Mapie est en tournage et donc, elle ne sera pas avec nous.
Elle s’est vraiment beaucoup investie dans tout ce projet, et je me sens tellement chanceuse de l’avoir à mes côtés. Elle a nourri ma réflexion, a augmenté mon niveau de jeu doucement mais surement. Elle y est allé par pallier. Son travail d’accompagnement a été fin et certainement pas facile pour elle. Je suis têtue, mais aussi enthousiaste….ca compense j’imagine. Pas facile d’accompagner un projet si personnel et déjà écrit. Elle a su vraiment respecté mes choix, mes envies (parfois farfelues).

Ces 2 semaines ont été vécues avec fébrilité. On n’a pas chômé comme on dit.
Je me sens prête. C’est excitant. Ca fait peur. C’est vraiment comme un accouchement. C’est à la fois une fin et un début. Longue gestation tout de même : 4 semaines de résidence d’écriture (seule à la mer), un aller retour à Paris pour rencontrer un historien, des coups de tel, des mails, des rencontres avec les pros, un temps indéfini pour l’écriture de dossier de demande de subside, du temps consacré au crowdfunding, 15 semaines de résidence de création, des semaines pour Alex pour créer les mario, des jours pour Nico à la musique, des jours et des jours pour Fred, Bertrand et Anne à la séno, des jours et de l’ordi pour Bruno et ses photos, des jours d’administratif et tout le reste pour Oli (super Oli), des lectures et relectures des Misérables avec toujours autant de passion à le lire...Des fous rires, du stress, de l’enthousiasme, de la vie, des déceptions, des peurs, du courage, de l’apprentissage, du café, du chocolat…


Demain, c’est la première représentation. On y est. Quelle joie !
Je ne veux pas décevoir mon équipe. Je veux qu’ils soient fiers de moi, fiers du travail qu’on a tous accompli. Au service d’une idée qui paraissait folle...Au service d’un thème qui n’aura jamais peut être autant résonné avec l’actualité...On nous impose un « couvre feu », et ici, on parle de LIBERTE…
J’ai hâte de vous rencontrer public . J’ai hâte de vos rires, vos soupirs, vos émotions . J’ai hâte de partager ce moment ensemble. Hâte de partager le silence, la beauté d’une image, d’une musique.
Je sais qu’au moment de me costumer, je serai morte de trouille. Que je me demanderai ; qu’est ce que je fous là, et pourquoi diable me suis je mis dans cette situation ? Pourquoi me suis je poussée toute seule à faire ça ? Personne me l’a demandé, nom d’unch ! C’est la dernière fois, après je change de métier…
Et puis, sur mon tabouret, je regarderai le public entrer et il n’y aura plus toute cette peur. Il y aura l’envie de raconter cette histoire de « Toi, Gavroche » qu’on a mis tant de soin à écrire. Chacun est venu apporter sa sensibilité, chaque personne dans l’équipe (et au-delà) est venue nourrir son propos, éclairé ses parts d’ombre… Je sais qu’au moment ou les premières notes d’accordéon résonneront et que j’aurai mes yeux dans les vôtres, le temps sera suspendu et on sera vraiment « TOUS ENSEMBLE »…



Septembre 2020

Journal de Bord, MFM, Septembre 2020
(Daal de lentilles en préparation)

Ayé, officiellement, j’ai fait mon tout premier filage ! Qui l’eut cru ? Mazette, cette création est riche de rebondissements…
Faut que je rembobine le fil de ces 2 semaines écoulées. On a eu un accueil technique pour le moins surprenant. Ils sont crispés du protocole sanitaire, la vache ! Je me suis permise d’envoyer un mail, je ne pensais pas avoir de réponse. Et bien, en plus des excuses, j’ai même eu droit à une petite visite du directeur en personne.
Bref, les espaces sont séparés. Comme on veut séparer les gens...Ca me titille dans l’émotionnel, et j’aimerais bien être forte et n’en avoir rien à faire sauf que, j’ai l’impression qu’on me tue avec toutes ces mesures, qu’on tue nos métiers... et que je ne peux rien faire, je me sens si impuissante.
De la résistance joyeuse ? Des discussions avec des gens qui sont dans la peur ? Des signatures de pétitions ? Tout ceci est ce suffisant ? J’ai eu beaucoup de colère. Ça commence à s’estomper, et à se transformer en lâcher prise.
Changeons de sujet. Je sais enfin ce que j’ai à la cheville. Le spécialiste a été vraiment chouette et a bien pris le temps de m’expliquer. Mon tendon est mal placé sur ma cheville. Suite à un mauvais geste, ce tendon s’est déplacé et a entrainé l’arrachement osseux niveau malléole, avec en prime une entorse interne. Je fais ma kiné sérieusement, je sens que ça avance bien. Je fatigue vite tout de même si je reste trop longtemps debout, ou que je marche trop longtemps. Ces semaines sont décisives pour prendre la décision de jouer ou non nos premières en octobre…


TRAVAIL PLATEAU
Alexandra est venue jouer sur le plateau pendant 2 jours.. C’est encore une fois beaucoup de gratitude que je ressens car voire d’autres manipuler me montre comment mieux travailler. Elle me donne des petits conseils de ci de là, l’air de rien. Je prends. Je savoure, je goûte. C’est elle qui a construit toutes les marionnettes donc, c’est une chance supplémentaire. Elle trouve des améliorations à faire sur les marionnettes ; comme teinter la barre dans le dos de Gavroche par exemple…
Après ces 2 jours, on se retrouve seules avec Mapie. Je nous sens en tension. Je n’ose pas lui dire que je sens tous ses doutes, et que je n’en veux pas. J’ai besoin de sentir que ça va aller, qu’on peut y arriver, de positivisme. Du coup, je suis plutôt bien butée au plateau. Heureusement, un jour elle me dit « tu te rends compte que tu me dis tout le temps non ? ». Là, je prends conscience que je suis en résistance et que c’est à moi de changer. Imperceptiblement, la tension s’estompe et on peut travailler dans une meilleure ambiance.
Et puis, je crois aussi que Mapie voit qu’on avance bien, qu’on resserre tout, qu’on vise l’essentiel, qu’on ne s’encombre plus de détails, qu’on lâche des choses en route. (et que ces choses-idées pourront peut être servir pour une autre proposition artistique).
Comme je cavale sur scène, que je vais trop vite, que ça s’affole à l’intérieur et que je n’arrive pas à calmer les lions, on travaille le texte avec un accent. Ca nous détend, et ça nous fait rire aussi…
Je dois apprendre à travailler avec cette douleur à la cheville. Et parfois, ça me freine. Je pense par exemple pouvoir faire un bout de filage, et ce n’est pas possible...
Il y a aussi la musique à gérer. Nicolas nous fait des propositions qui parfois ne correspondent pas à ce qu’on a en tête. Mais pour lui, ça a une logique, et c’est son interprétation. C’est ça qui est fascinant. Comment un autre regard, une autre sensibilité s’imprègne du spectacle et propose sa vision, vient l’enrichir. Ca demande une finesse pour s’accorder. Et de la patience aussi.
J’ai proposé par exemple de jouer la scène de course poursuite devant lui sur « la rage » de Kena Arkena.
Suite à ça, Nico m’a fait une superbe proposition et c’est chouette d’être accompagnée avec son univers. Ca habille encore plus le spectacle. Je pense souvent aux lumières. Mapie aussi. Elle les imagine.
Je dois enregistrer des phrases, et un texte que j’ai écrit pour la scène de barricade. J’ai demandé à Christophe Gras, mon pianiste, de créer une mélodie pour cette scène ou Gavroche va sur la barricade. C’est une scène visuelle.
J’ai demandé à Pierre Boudeulle et à Grand Corps Malade (enfin à son staff qui n’a sans doute pas passé le message, vu son actualité en ce moment) s’ils voulaient bien enregistrer ce slam . J’avais imaginé que cette voix d’homme pourrait être la voix d’un Gavroche adulte (s’il avait survécu). Mais Mapie n’est pas du tout convaincue ; elle dit que ça va faire bizarre d’avoir une voix d’homme sortant d’on ne sait ou. Que c’est trop difficile à comprendre mon point de vue. Que cette voix doit être celle de Gavroche, ou celle d’Eugénie (la mienne). Donc, pour l’instant, je fais ce que me dit Mapie parce qu’elle a raison. C’est plus juste comme ça. (Mais j’essaierai bien à l’occas avec quand même une voix d’homme ...)
Le costume se finalise.
Je dois encore apprendre certains passages du texte qui ne sont pas bien ancrés dans ma mémoire.
J’ai un mal de chien à faire ce qui a d’écrit sur le papier. Alors on est d’accord, c’est nous qui l’avons écrit. On travaille une scène avec les mario, on écrit tout ; les gestes, les intentions, les regards, les respir’, tel mot vient après tel geste etc. C’est une partition marionnettique. Puis, après, il faut le refaire. Juste le refaire. Sans jeu. J’en suis incapable, c’est énervant. Je trouve toujours quelque chose à changer, un autre chemin...Alors que la consigne est pourtant claire ; refaire ce qu’il y a d’écrit, on n’a plus le temps de chercher autre chose ,nom d’unch! Je me fatigue… Pauvre Mapie. Quelle patience ! Je pense que c’est la femme qui m’a le plus longuement regardé , peut être plus que ma mère.
Nous avons retravaillé toutes les transitions, le sens. Le choix des mots. Le choix des gestes. Nous avons décortiqué chaque scène. Nous sommes arrivées au bon endroit, je pense. Il me faut à présent l’avoir dans le corps ce spectacle, pour pouvoir le savourer et l’offrir au mieux. Evoluer en fonction du rythme. Et quand même ,prendre le temps de chaque sensation, geste, parole, regard…Piou, quel challenge ! Dans quoi me suis je lancée ?
Le dernier vendredi, on a prévu un filage complet. Le premier. Mapie est à Paris au matin pour des essais caméra (elle va tourner dans « germinal », la série). Elle va louper son train à cause du retard pris de la prod et donc louper aussi mon premier filage….
Je me sens perdue sans elle. Comme une sensation d’être abandonnée, d’être lachée dans le vide...Sans sa bienveillance, et son regard. Mes premiers pas sans elle. J’y étais pas préparée. Mais il faut y aller. Heureusement, Bruno est là. Il va assurer le lancement des musiques. Kalai est venue aussi pour ce filage. C’est vous les privilégiés donc. On met en route la caméra et c’est parti mon kiki. Je m’embrouille, je fais des erreurs, je dois gérer le jeu, mais aussi les top des sirènes de police, des manif etc. Je ne retrouve plus le chemin corporel de certaines transitions, mais dans l’ensemble, ça tient ! Le spectacle dure 1h03. Bruno est ému. Il découvre certaines scènes en entier, il suit le spectacle depuis le début. Et même, depuis le tout début de mon idée de monter les misérables en solo...J’ai rencontré Bruno lors de vacances en Normandie,et j’étais plongée dans la lecture des Misérables. Et j’ai lachée cette phrase à Oli : « T’imagines si je montai les Misérables en solo marionnettique ? » et lui de me répondre « va s’y, fais le ! ».
J’avais juste besoin d’un encouragement, qu’une personne y croit pour me donner la folie d’y croire moi aussi. Et puis sont venues des semaines de résidence d’écriture seule face à la mer...et prendre la décision de ne tirer que sur le fil du personnage de Gavroche. Parce qu’il me touche encore plus que tous les autres. Avoir la volonté de le relier à mon époque, à moi, à nous. De rencontrer des pros, des futurs partenaires, de constituer une équipe, de choisir les gens qui vont m’accompagner et y croire, de relever la tête et les jambes face aux coups durs, d’oser demander de l’aide, de dire MERCI, de continuer encore et encore à ne rien lâcher, de travailler coûte que coûte…
Petit bonhomme, tu n’es même pas encore sorti, mais qu’est ce que tu m’auras déjà fait grandir !
On a déposé le décor chez Fred. Il va être finalisé, elle a encore beaucoup de boulot,plein de petites choses à droite à gauche. j’espère que ça ira...J’ai trop hâte de le voir sous les lumières.
Cette semaine est dite de « relâche ». Je suis à la maison mais je pense aux multiples petites choses à faire ; enregistrer, jouer de l’accordéon, regarder le filage, aller acheter un haut avec manches longues, apprendre mon texte, téléphonner à Juju pour préparer la technique, appeler Kalai pour l’affiche, les pros, appeler Antoine pour la vidéo, Mapie parce que j’ai envie, Nico pour la musique, appeler la sadc, la sacem, aller au kiné, apprendre mon texte, rejouer la scène des Thénardier, appeler ma mère, aller dans mon potager, ramasser les courgettes, aller chez l’osteo, imprimer mon texte, apprendre mon texte, détendre mon texte , reprendre mon texte, saturer mon texte, apprendre mon texte et ghhhrrr oublier mon texte…
Et peut être aussi un peu, cette semaine, j’aimerai regarder mes enfants vivre et me reposer un petit peu?


Juin 2020

Journal de bord, Tournai.

J’entame cette semaine avec une drôle d’énergie. Ma grand -mère est décédée la semaine précédente…
Toute l’équipe est aux petits soins avec moi. Et ici, à Tournai, nous sommes vraiment bien accueilli. Le lieu est chargé puisque la salle ou nous répétons est attenante au musée de la marionnette. C’est très inspirant. Il y a un chouette parc derrière la bâtisse. Je peux venir travailler en vélo...
Nous montons le décor, avons beaucoup de travail puisqu’on aurait du être aussi en résidence la semaine passée…
Nous voulons avancer sur toute la fin du spectacle, tester de nouvelles idées.

Cette semaine, nous avons rencontré la presse ; Notélé est venu faire un reportage sur la maison de la marionnette. Et une journaliste de « l’avenir » est venue m’interviewer, spécifiquement pour donner un coup de lumière sur le crowdfunding qu’on a mis en place. Et oui, n’ayant pas obtenu les subsides de la FWB, nous nous lançons dans un financement participatif. Nous avons fait une chouette vidéo pour présenter notre projet ; avec Guy, nous avons passé 3 jours à filmer. Guy a passé du temps pour le montage et le résultat est vraiment beau ! Il n’y a plus qu’à...La campagne est lancée et elle démarre très bien. C’est rassurant. Et aussi, au-delà des dons que l’on reçoit, c’est toute une énergie que l’on nous donne, un bel élan de solidarité pour notre Gavroche. Ca va bien plus loin qu’un simple geste financier. Des amis, des proches, des connaissances me montrent que je peux croire en ce projet, et qu’il faut coûte que coûte le continuer .C’est un encouragement du coeur qui me donne une sacrée dose d’investissement supplémentaire. Mon équipe a été admirable. Tous me soutienne, ça me donne une telle force.
J’ai envie de parler aussi des sensibilisations qui ont pu reprendre. Alex a pu fabriquer les marionnettes avec les élèves que l’on avait rencontré. Pour Hélène, l’institutrice, il ne fallait pas lâcher ce projet, cette occasion. Mapie y est allée aussi. Et ce qu’il s’est passé dans cette classe a été d’une telle intensité...Les échanges ont été touchés de grâce et d’humanité. Les enfants étaient plus qu’enthousiastes pour fabriquer et manipuler leur marionnette.
Avec Gavroche, on leur a envoyé des petites vidéos. Le lien est très fort.
Je dois bien avouer que je ne réalise pas bien encore toute la magie que dégage cette marionnette, toute sa portée... Est ce parce que c’est Gavroche, ce personnage historique de Victor Hugo ? Sont-ce mes intentions que l’on sent derrière ce personnage ? Est ce la marionnette, l’objet en lui même ? Ces 3 suppositions combinées?
Ce qu’il s’est passé avec cette classe me montre déjà à quel point je peux avoir confiance dans ce qu’on entreprend (et ma manip’ aussi…) et son utilité, son sens.
Nous avons tellement besoin de sens dans cette période si particulière. On nous enlève tellement de droits, on nous fait tellement peur… et tout ça, avec une telle arrogance de non sens. Il faut croire qu’on n’apprend ni encourage le sens pratique et la réflexion à l’ENA…et certainement pas la transparence ni le courage.
Revenons au plateau. Cette semaine, on n’a pas chômé. Nous avons essayé de retrouver dans les mains la course poursuite. Nous avons vu de belles transitions entre les scènes. Nous avons peaufiné l’écriture. Nous avons testé une autre manière d’aborder cette p...de scène d’accouchement. Nous avons essayé de déconstruire le décor, de triturer les planches, les espaces. Nous avons fait évoluer Gavroche sur la barricade. Nous l’avons fait mourir… Nous avons levé le poing et balancé des slogans, des banderolles...Comment parler d’égalité à un public de 8 ans? À un tout public ? Comment parler de solidarité et de liberté ? Mazette, qu’est ce que ça nous a questionné. Et ça me questionne encore… Je le sais, au fond de moi. Je la connais la réponse. Ce qu’il faut : La simplicité. De dire. D’oser dire les choses comme elles sont. Ce que je veux, ce que je souhaite. « Qui suis je moi pour parler ? » (oui encore Victor Hugo) Mais avec un brin d’humour parce que sans ça, moi, je crève de mal à l’intérieur. Et aussi parce que ce que je veux : c’est réveiller de l’audace chez les grands. L’audace d’être eux même, l’audace de dire STOP, de se débarrasser de fausses croyances, de l’habitude, des chemins déjà mille fois sillonnés.... D’oser dire oui à la liberté, même si elle a un prix…
Cette semaine, une belle surprise nous attend. Ça fait 2 ans que j’attends ce moment. C’est elle qui est venue à nous. On rencontre Kalai, qui a envie de nous accompagner sur le projet. C’est une chargée de diffusion. C’est la personne de l’ombre qu’on ne met jamais assez en lumière. C’est cette personne qui va à la rencontre des pros, des directeurs de salle, des structures culturelles pour vendre le spectacle. Car oui, malgré toute la poésie de la culture, un spectacle est un produit. Donc ça se vend. Et pour qu’on puisse faire connaître notre travail et continuer à le faire, on a besoin d’une chargée de diff. Je suis vraiment très heureuse de savoir que le projet va se lancer avec elle.
Avec Mapie, on a l’impression de faire une course molle contre la montre. Il fait rudement chaud. Et on veut à tout prix filmer un premier filage du spectacle en entier. Bref, on veut avoir le résultat de 2 semaines de travail en une seule. Pari osé, pari presque tenu ! Ce vendredi matin, donc, nous y voilà. On se lance ; on oublie, on trébuche, on manipule, on se fait plaisir, y a de sacrés beaux moments, et des parties sacrément à revoir. ..
Mais on va au charbon comme on dit, tout est dans la boîte. On va oublier le spectacle un peu pendant ces vacances, et y revenir avec du recul. Et ce sera bon...Enfin, y aura d’autres directions, affirmations, questionnements, envies...J’ai l’impression à la fois de pétrir une pâte, et de fignoler certaines fioritures sur un gâteau.
J’ai besoin d’une vue d’ensemble, et je la regarderai d’ici quelques semaines... Cet été, le décor va être créer. La musique aussi. Les marionnettes vont aller se refaire une p’tite santé chez Alex. On habille le spectacle pas encore terminé. Ça me remplit de joie.
Sans cette équipe, je ne suis rien. J’ai rêvé d’un Gavroche, et je teste des bouts de rêve sur un plateau de théâtre.
Je suis chanceuse d’être si bien entourée. Tout ça devient si concret. J’ai soif de le présenter au public, j’ai soif de partager. Ça me manque ces moments ou l’on est ensemble, les yeux dans la même direction.Ou l’on partage un même espace temps.
Le vendredi matin, nous faisons notre fameux filage filmé. Puis vite vite, on remet tout le décor en place et on invite toute l’équipe de la maison de la marionnette pour 20 min de spectacle. On leur montre le début du spectacle. J’ai le coeur qui bat la chamade, je suis impressionnée, mais finalement, je m’amuse. Ils sont tous masqués, loin les uns des autres. Mais ils s’embarquent avec moi...On a de superbes retours de leur part qui me touchent plus que je ne le montre. Je me sens pleine de gratitude, et ça me donne beaucoup de confiance pour la suite.
Je finis bien évidemment sans cerveau, avec courbatures et fatiguée. Mais j’ai le sourire aux lèvres. Parce que malgré tout, on a bien avancé. Et qu’on a encore plein d’aventures à vivre, de situations à créer, à déconstruire, à balayer, de pépites de pensées à (re)découvrir et partager.
Je décide de ne pas penser à la situation actuelle si elle devait perdurer et qu’on nous ferme les théâtres. Ce projet doit voir le jour ! Depuis le début, il a un magnifique chemin. Et de magnifiques gens rencontrés ! Les théâtres m’ont montré leur soutien. Mon équipe, mes amis, des connaissances...Tous me donnent tellement de force.
Demain, départ pour la Bretagne. Ca aussi , c’est ma force.


Mai 2020

Résidence à la Makina, mai 2020
Journal de Bord, lundi matin, sans enfants, Ella Fitzgerald et Armstrong pour m’accompagner.
C’était une telle joie de se retrouver avec Mapie, les mario, le décor, et cette envie de bosser. Nous étions à la Makina. Cette semaine a été riche sur le plateau, et en émotions.
Raijo Taisu (gymnastique japonaise qui dure 3min13) tous les matins avec Mapie pour commencer la journée.
Au plateau, j’ai eu la sensation d’être libre, de réinventer des scènes, de pouvoir tout réaliser. Nous avons essayé de bouleverser la scénographie pour cette fameuse scène de la barricade, nous avons trituré de la planche et « cassé » le fond de scène. Nous avons trouvé un autre chemin physique pour la scène dans l’éléphant du souvenir. Nous avons ancré la scène de course poursuite, et avons beaucoup ri à une blague de « poulet »(référence aux flics) et aujourd’hui encore, je me marre toute seule en y repensant…
Nous n’avons pas du tout fait de filages, ni revu ce qu’on avait déjà fait...Et c’était bien ainsi, nous n’aurions pas pu autant avancer sur le reste sinon. L’accordéon, quand même, reste taquiner tous les jours…

Nous questionnons la manière d’écrire cette scène de barricade... je sens que ça touche au plus profond du spectacle, et ce pourquoi je le fais. Comment amener de façon engagée mais néanmoins décalée les slogans de manif ? Que mettre ? Que dire ? Quoi partager ? Comment porter les idéaux d’Hugo le plus personnellement et le plus authentiquement ? Parce que si je suis juste pour partager à quel point sa lumière, et son humanité me touche, c’est tout le public qui sera touché. J’espère tellement que ce spectacle ne soit pas seulement un spectacle, mais une mini rêve-olution pour les gens. Une prise de conscience. Une énergie à bouger son petit monde intérieur, une liberté comme retrouvée. Une rage joyeuse, oui !
Fred, la scénographe, est passée. On a bien avancé. Concrètement, on sait enfin où l’on met les pieds (il serait temps, n’est ce pas? ah ah). Elle nous a beaucoup aidé dans cette réflexion, à simplifier. A faire des choix. A faire avec ce qu’il y a déjà.
Juju est aussi passée pour les lumières, et pareil, ces quelques conseils nous ont beaucoup éclairées. (oui, je sais, elle est facile celle là) Il y avait aussi Nico, pour la musique.
Bruno est venu faire des photos le jeudi. Oui, parlons s’en de ce fameux jeudi. Dans l’après midi, la nouvelle tombe. La mauvaise. Ça fait 7 mois qu’on l’attend cette fameuse réponse.

La seule subvention à laquelle nous avons droit ici en Belgique pour la culture ne nous est pas accordée. Je n’ai pas les raisons de ce refus par téléphone ; je recevrai un courrier compte rendu de la commission des experts. Si je dois encore attendre 7 mois…
Je m’effondre. Littéralement. Je trouve cette décision injuste ; c’était énormément de travail ce dossier, on a bossé avec Oli comme des acharnés dessus, en soignant tout. On s’était motivé pour l’équipe, pour pouvoir les payer correctement. Piou, ce jeudi, tout s’écroule. Sauf ma rage.
Alors, bon, Merci la Fédération Wallonie Bruxelles, peut être que je manquais encore un peu de rage, voyez... Vous l’avez réactivée. Je vous en remercie parce qu’après la colère chez moi vient beaucoup d’amour. Et ça, c’est un excellent terreau pour créer.

Des amis, la famille ont suggéré l’idée d’un crowdfunding, parce que tout simplement, ils veulent m’aider. Peut-être croient-ils aussi en ce projet. Peut être ressentent-ils à quel point c’est nécessaire ce spectacle, ces propos sur la liberté, la solidarité, l’être ensemble… ?
Après une réunion avec Oli sur le budget, où je me suis sérieusement demandé si je n’avais pas fait une boulette, rêver trop grand... il nous a fallu appeler toute l’équipe pour leur demander de baisser leur salaire de 10 %. Tous ont accepté, et dans la manière de recevoir cette nouvelle, je sens toute leur motivation, leur envie, leur soutien .Et ça, ça m’a fait un bien fou. Purée, qu’il va être beau ce spectacle avec cette équipe là !
Nous sommes donc occupés à préparer cette campagne, à faire de la vidéo (Merci Guy pour tout ce temps passé….3 matinées de tournage, une journée de montage, ré-enregistrement des voix), à contacter la famille, les amis, les amis des amis, la presse… Au début de la semaine prochaine, le 15 juin, c’est parti mon kiki.

A côté de ça, Mélody me propose de m’aider pour le dossier de com et l’affiche.
Je me sens chanceuse, je me dis qu’on est sur la bonne voie. Pendant le confinement, des théâtres me contactent pour programmer « Toi, Gavroche » la saison prochaine. J’y vois là un encouragement. Mes partenaires institutionnels aussi sont là, très à l’écoute. C’est le signe que je dois continuer coûte que coûte, que je dois consacrer mon énergie à ça. J’ai parfois peur de ne pas être à la hauteur de mon équipe, de ce projet. Mais la peur… ça se crame. Et j’aime les feux de joie !

La semaine prochaine, on reprend à la MFM dans des conditions sanitaires particulières. Pas grave, j’ai trop hâte d’être de nouveau avec Mapie (à 1m50), sur le plateau, avec mes marionnettes. J’ai repensé la scène dite de l’accouchement, et j’ai très envie de tester ce que j’ai dans la tête. Faut s’accrocher !
C’est les montagnes russes émotionnelles de créer, mais c’est tellement beau de voir que ça avance pas à pas. Des fois, le chemin est de velours, des fois il est épineux. Il est surprenant ! Comme dans la vraie vie. Et j’apprends tellement sur moi, grâce aux autres . Ce confinement m’a apporté aussi un ancrage. Youpi dou wah, c’est reparti la semaine prochaine pour d’autres avancées spectaculaires !
Lucie, pour la cie du Bonjour



Le 25 mars 2020

Journal de Bord, avec retard
Les circonstances actuelles chamboulent cette création, et c'est avec retard que je peux enfin revenir sur cette semaine de résidence à Bruay...
Nous y sommes restées une semaine, en cocon total. Nous dormions sur place, passant du brossage de dents au plateau direct. Qu'est ce que c'est bon! J'ai pu m'échauffer, m'étirer, méditer et même avoir des massages...
Nous avons été superbement accueillis par l'équipe technique, ils ont été au top!
Nous avons enfin finalisé cette scène de présentation des Thénardier; gros morceau que je dois assimiler dans les mains et dans la mémoire...Heureuse cependant de la tournure que ça prend, même si pour l'instant, je ne me laisse pas aller à l'éclate,on a balisé le chemin pour que je puisse y aller...
Nous avons retravaillé la scène de l'éléphant, et un peu la course poursuite. Nous avons encore de questionnements sur le décor mais ça se précise quand même.
Une nuit, je ne trouvais pas le sommeil, j'ai visualisé la scène de fin. Et c'était beau!!!
Gavroche s'est blessé au genou, un bout de son articulation s'est cassé: on l'a réparé en urgence avec du gaff, mais Alex va devoir y jeter un sérieux coup d'oeil...
Nous avons précisé encore des intentions sur ce début du spectacle. Je me rends seulement compte du travail que c'est de passer de la narration, à la manipulation, aux adresses public tout en manipulant, du rapport qu'il y a entre Eugénie et Gavroche, les différentes marionnettes...L'énergie de jeu n'est pas la même, ne se place pas au même endroit. ça me demande une sacrée concentration. Je suis speed sur le plateau et ne goute pas assez aux situations. Je suis un peu partagée entre ce que je vis au plateau et cette question finalement du metteur en scène "qu'est ce que je veux dire? est ce vraiment ça? c'est quoi l'enjeu?".
Bien sûr, avec Mapie, nous échangeons énormément sur tout ça. Nous revenons encore et toujours aux Misérables, aux écrits d'Hugo. Nous (re)découvrons à chaque fois des pépites, qui nous apportent de la lumière.
Perso, je sens vraiment la présence d'Hugo (le gros je l'appelle...à cause des livres) sur notre chemin.
J'adore quand Mapie finit par venir au plateau et prendre les marionnettes tout en me disant "bon, moi, je suis pas marionnettiste mais..;et si tu faisais comme ça...." et à chaque fois, ça me donne une nourriture et un axe en plus! Elle a une justesse dans son jeu, dans ses intonations, même dans ses respirations ...ça m'impressionne beaucoup et je me trouve très chanceuse de l'avoir à mes cotés dans cette aventure. Son expérience est énorme, et souvent, elle me dit "essaie".
Bruno nous a rejoint les 2 derniers jours, c'etait chouette comme tout et on a de superbes photos ( a venir très prochainement).
Nous avons présenté une étape de travail devant un public très varié; de 6 ans à 77 ans je dirai. Il y avait des ados, des jeunes d'un atelier théâtre, des ainés d'un club d'écriture (qui travaille sur Hugo cette année), des mamans avec leurs enfants qui font du théâtre à Bruay, des électrons libres, ma maman... Il y avait une quarantaine de personnes.
C'etait SUPER de présenter notre travail à un public qui ne connaissait pas notre univers. J'ai adoré l'accueil public; voir comment les gens se sont détendus parce que je les y invite, ça change le rapport imperceptiblement , subtilement mais d'une belle humanité. C'est là que je vois les bénéfices d'avoir été clown à l'hopital pendant 8 ans: j'aime voir les yeux des gens, j'aime être physiquement proche d'eux, j'aime créer un lien...J'ai très fortement ressenti aussi comment ils plongent dans l'histoire de Gavroche, comment ils sont touchés, emmenés. Les grands comme les petits, chacun y trouve de la nourriture. C'etait beau cette écoute et cette concentration collective. Défi à tenir tout le long du spectacle Ma petite dame...
Nous avons pu échangé et j'ai eu de superbes retours, des chouettes questions. Une maman m'a dit Merci les larmes aux yeux, les ainés m'ont félicité pour la manipulation mais aussi pour "ce que je défends", qu'ils avaient bien senti mes intentions, une ado est venue me demander pour manipuler Gavroche (ce qu'elle a fait "ah ouais, quand même...." se rendant compte que la manipulation, ce n'etait pas si simple en fait!)...
On a remballé et le retour dans le camion avec cigarettes et chocolat etait délicieux. On s'est fait de chouettes retours sur notre travail , mais aussi sur notre manière d'être, de travailler. Forcément, que tout ça, ça fait avancer la connaissance de soi, voir l'acceptation de soi...
Et la suite? Mapie a pu faire deux interventions avec la classe d'Hélène. La troisième a été annulée...et puis...le reste....
La résidence prochaine a été annulée, c'était à Tournai, début avril. Tout va se décaler, je me demande comment on va faire pour le décor...
Car là, nous avons du couper, scier, rétrécir mon prototype de bar pour que je puisse l'installer dans une des chambres qui est en travaux à la maison. De cette manière, je peux quand même un peu travailler. Oui, un peu....parce qu'à la maison, j'ai aussi deux " collègues "de 5 et 7 ans en pleine forme...et je n'ai pas Mapie.
Mais dans cette situation de confinement, plus important que le fait de travailler ou ne pas travailler; c'est le sens de tout ça, ce que ça vient toucher personnellement et collectivement. Qu'est ce que ça me fait à moi? Qu'est ce que ça dit de moi? Quand tout ceci sera terminé, allons nous vivre comme avant? les gens vont ils enfin s'éclairer? et mieux, les "décisionnaires" (je ne veux pas les appeler "les puissants", puisqu'en réalité, ce sont eux les misérables) vont ils cesser d'être égoistes, de nous culpabiliser...? Qu'est ce que je peux faire à mon échelle?
Oui, questions naives. .. Pour ma part, ça travaille sur la notion de liberté, et ma relation aux autres.
"C'est une triste chose de songer que la nature parle et que le genre humain n'écoute pas." Victor Hugo
Avec un grand soleil dans le coeur, et dans le ciel, je te souhaite une bien belle journée, avec Johny Cash et June Carter "Jackson"
Ou "résiste" de France Gall... et soupe d'orties au programme.
Lucie, pour la cie du Bonjour


Le 25 février 2020

Musique classique et soleil ce matin pour m'accompagner.
Ces 2 semaines ont été intenses sur le plateau, sur les horaires et dans ma tête....On a bossé comme des acharnées, en se faisant plaisir bien sûr mais je crois m'être donné trop loin.
(mon corps le crie en tous cas, puisque je suis coincée du dos, vive l'ostéo!)
Nous avons travaillé tout le début du spectacle, remis de la rage là ou il en manquait, recité et integré les mots exacts d'Hugo; en slam, en narration. Gavroche nous a fait peur; il ne marchait plus correctement, heureusement super Alexandra est venu l'opérer d'urgence et après, tout etait en état de marche.
Nous avons reçu la classe de CM2 avec laquelle nous avions déjà fait une intervention chez eux avec Gavroche.A cette étape de travail, ALex etait présente, et aussi les 2 scénographes. Quelle équipe! Wahou ,quelle équipe formidable....Je suis tellement chanceuse. Bruno etait là aussi, il a pris des photos de cette rencontre.
C'etait tellement riche ce moment: j'ai eu peur comme les premières fois ou je montais sur scène ("mais pourquoi je fais ça? Personne ne me le demande...c'est horrible, je vais mourir. Quel métier, c'est pas possible, j'arrête"). Les enfants ont tout absorbés, ils ont été touchés, ils ont plongés dans l'histoire...C'etait drôle parce que pendant l'accueil ,je les sentais heureux d'être là, et donc prêt à me causer comme on l'a fait dans la classe....et puis, pendnat le filage, je me suis rendue compte que la qualité d'écoute avait changé, et qu'ils etaient totalement emmenés...Il ont été fort touché par la" scène de rue ", là ou on voit le quotidien de Gavroche dans la rue, touché par le slam (texte d e Victor hugo slamé par gavroche), et par la relation que Gavroche a avec sa mère. On a présenté une demi heure; ils en voulaient encore.

Moi, j'ai été surprise parce que ça y est, ce que j'ai dans ma tête est concret sur le plateau, et que ce qui m'anime est partagé. ça ne m'appartient donc plus: comme un peintre qui peint une oeuvre avec une intention, dans un contexte, et le spectateur le voit et le reçoit avec sa perception à lui, son histoire...
Ce qui m'a fait le plus plaisir (et surprise aussi parce que je n'y avais pas pensé), c'est qu'on leur a demandé ce qu'ils avaient compris de l'accueil (je les accueille pour une réunion clandestine) l, ils ont dit "bah, on est des grands."

Pendant ces 2 semaines, nous avons fait des filages tous les jours. Pas d'échauffement, ni d'étirements, c'est ce qui nous a manqué. on avait certainement peur de perdre du temps....
Avec Mapie, c'est tellement fluide, la parole est directe, on se retrouve sur beaucoup de points, elle amène des précisions là c'est flou, me fait redescendre de terre là ou je vole trop haut....
Sa présence m'est tellement essentielle. Elle est juste dans son énregie, ses repsirations, sa présence....Je suis honorée de travailler avec elle!
Pour la scénographie, on a décidé d'avancer un peu plus dans le spectacle avant de faire quoi que ce soit, de faire des test en mai quand on sera à la MAkina, et de le construire dans la foulée semaine suivante.
Juliette (création lumière) est venue aussi au filage: elle est tombée amoureuse de Gavroche. Elle nous a fait de chouettes retours, elle m'a félicité pour la manip, c'est con mais ça m'a fait drôlement plaisir.
Nous nous questionnons sur la scène dite du" cabaret" : Mapie craint que ça soit trop différent de tout le reste du spectacle, on craint au niveau timing que ce soit trop long (à mettre en place et trop long comme durée de spectacle), et moi, je crains que la poésie des bulles surpasse le message que je veux faire passer....ouh là, que de craintes!
On a construit une mini table à bulles (dans un faitout) exprès. Oui, toutes les choses qu'on rêve et qu'on abandonne pour le bien du spectacle...Il faut beaucoup de matière pour tailler un diamant. (shine on you crazy diamond!)
Je laisse poser ça parce qu'on a tellement encore à faire; on a avancé sur la scène de présentation des Thénardier mais pas encore terminé...il y a tellement de possibilités !on a débroussaillé un peu la course poursuite; (ça bosse des bras en hauteur, je vous l'dis!) que c'est long pour juste 2 min visuel....Mais ça avance.
On replonge régulièrement dans la lecture des misérables, des bribes, des phrases, des passages, et ça nous résonne tellement encore. On a relu le texte qu'il a écrit sur la misère. ça pourrait être dit par un ruffin ou une taubira, tellement c'est criant d'actualité!!!!
Pour moi, ces 2 semaines, j'ai eu beaucoup de mal à me sentir apaisée; je me sentais tiraillée entre la résidence dans laquelle je plonge entiérement et ma vie de famille. Je rentrais tous les soirs, j'etais présente mais pas là, j'etais encore dans ma tête, avec les mario, le texte....Je couchais les loulous et après, je continuais de bosser pour préparer tel truc, ou imprimer tel bazar....Bref, je suis contente que la prochaine résidence soit à Bruay, car on reste sur place!!!! je n'aurais pas à vivre tout ça....
On va rencontrer quelqu'un le 16 mars pour la diffusion. On se fait tout doucement un "carnet d'adresses". Mais ça, je ne trouve pas encore le temps de gérer. Merci Oli!
Mon chemin avec cette création s'éclaire comme la lumière qu'Hugo distille dans les misérables. Je me sens pousser des ailes, qui sont un peu grandes pour moi pour l'instant. mais je travaille à les accepter, et en attendant, je vais chez l'osteo aujourd'hui pour qu'il me les ré ajuste....
Je te souhaite une bien belle journée, avec inxs, Mystify!
Cordialement,
Lucie pour la cie Du Bonjour


Le 28 novembre 2019

Bon matin tout en douceur avec "shape of my Heart" de Sting...

La semaine dernière, nous étions encore à Moulins (on va finir par l'appeler la maison) pour 4 jours.
C'est toujours bien en chantier nos tableaux, et en même temps ça se précise. Jeudi, nous avons fait notre premier "filage" (avec des zones floues, des transitions à trouver etc...) mais nous sommes déjà à 40 min de spectacle (dans nos tableaux, on en est à peu près à la moitié) BIM! Je vais devoir dire aurevoir à certaines de mes idées farfelues que j'affectionnais tant mais la qualité du rythme du spectacle prime sur tout ce que je veux offrir...
D'ailleurs, on se demandait combien de temps peuvent tenir les enfants ( a partir de 8 ans) en spectacle? Un film, c'est bien 1H20 donc...peut on tirer jusque là? (si j'en suis capable?) C'est que c'est dense de causer des Misérables!
Est ce génant que ce soit plus long qu'une heure par rapport aux horaires en scolaires (je pense au bus etc...)? Qu'est ce que t'en penses?

Gavroche peut vraiment tout faire; cette marionnette est un cadeau à manipuler, et d'ailleurs c'est lui qui me manipule à présent.
Monsieur et Madame Thénardier ont pris de l'étoffe: ils sont horribles et ridicules, un poil touchant même parfois.
on casse les codes marionnettiques et ça nous plaît:!!! (et puis, je n'ai pas le choix pour être plus libre avec mes 2 mains....)
par exemple, je peux poser la thénardière sur le bar, et faire vivre le Thénardier sans que ça pose de problème. On l'oublie et on la reprend plus tard dans l'histoire. la marionnette de Thénardier se construit devant le public, puis en jeu;il s'habille lui même de ses sourcils et de sa moustache....

On a commencé à travailler sur la scène de la course poursuite; Gavroche, ses 2 frères et la police. La police donc; un gyrophare,et une lampe torche. C'est la scène ou l'on découvre que Gavroche est un yamakasi! Quelle surprise, il saute, rampe, se roule, fait des saltos, vole dans les airs....Tout fonctionne! Evidemment qu'il nous faut encore travailler tout cela dans l'espace parce que là, on travaille encore avec le prototype de la scéno....La scénographie sera construite en janvier. Et les marionnettes seront complétement terminées; elles repartent avec Alex pour des retouches finales.
On se questionne beaucoup sur la scène de l'élèphant du souvenir; doit on créer l'espace de l'éléphant en cartons? en toile? autre chose? doit on réellement faire la forme de l'élèphant ou juste y mettre un clin d'oeil à l'élèphant? le parallèle avec les tentes queshua me parle tellement ausssi....EN réflexion.

cette semaine, on a rencontré Hélène; une institutrice de CM2, à Moulins. Wahou, j'ai été cueilli en plein coeur;"pourquoi ce projet t'a plu?" elle me parle de la scène de l'élèphant....Mais merci! On a mis en place tout un calendrier de rencontres; à partir de janvier, on se retrouve tous les mois jusque juin.

D'ailleurs, on fait une étape de travail pour cette classe le 14 février au matin, à Moulins.

En chantier aussi: certaines transitions...que voulons nous réellement dire??? est ce les grandes lignes sur les idées de Victor Hugo ou est ce ce qui nous touche si particulièrement dans le personnage de Gavroche, gamin des rues: sa résilience, sa solitude, sa générosité, son panache, ses combats....? Comment lier les 2 sans que ce soit trop didactique ou impersonnel...?
On écrit des choses sur le papier et puis sur le plateau, les mots prennent une autre couleur, la réalité y est parfois trop forte...comme dans la vie.
Vendredi matin, redescente brutale de mon petit nuage; Daniela Carrasco. Cette clowne assassinée au Chili. Le lien est fait et criant; au moins, dans la mort de Gavroche c'est expéditif, ils ne l'ont pas torturé...
Pardon d'être un poil dramatique mais forcément que ça me touche; c'etait une femme et c'etait une clowne. Morte après une manifestation....Ma marionnette à côté...Quelle est sa force????
ça nous parait essentiel de choyer nos mots, de les choisir avec évidence et limpidité. Le temps, comme dans un deuil, est un ami précieux.
Plus que jamais, j'ai envie de me servir de ma rage pour la transformer en lumière., en joyau.

Nous étions fatiguées cette semaine avec Mapie, et de moi, elle a vu mon coté ronchonchon...Mais malgré ça, nous avons réussi à bien travailler. On se met la barre trop haute, on veut faire tel tableau et tel tableau...alors qu'un bout de scène demande des journées de plateau...Prochaine résidence; mi-février. C'est bien cette pause; on va pouvoir avoir un peu de recul.
Même si ce weekend, alors que je travaillais sur tout autre chose, j'ai rencontré une accordéoniste; et..pendant nos pauses, on a travaillé la chanson de l'accueil de "Toi, Gavroche".

Voilà pour les petites nouvelles de ce projet, comme ça, tu es un peu avec nous aussi...
La fin d'année approche, je ne résiste pas à un bon vieux "petit papa noël" et je te souhaite de très beaux moments festifs et chaleureux pour la fin d'année...

A tout bientôt,
Lucie Jacquemart pour la Cie du Bonjour




Le 10 octobre 2019

Bien le Bonjour,

Je t'espère en bonne forme et peut être même en vacances? Je suis accompagnée de mon café et d'Ella Fitzgerald ce matin pour donner des petites nouvelles...
Nous étions à la Manivelle Théâtre semaine dernière; nous étions vraiment bien. Quel plaisir de revenir travailler là, 10 ans ont passés depuis la dernière fois...10 ans comme ça, comme un claquement de doigts.
Nous avions les marionnettes (pas encore tout à fait terminé), le prototype du décor. On se rencontre encore un peu plus avec MArie-Pierre (quelle chance j'ai, ça pétille! c'est facile, c'est fluide, c'est bienveillant). C'est drôle, elle ne m'avait jamais entendu chanter, je m'en suis donné à coeur joie dans le studio qui résonne fort...
Notre objectif de cette semaine etait de travailler les 2 premiers tableaux (dramaturgiques) du spectacle; et bien, à part une transition à travailler, notre objectif a été réalise!!!! Il y a 7 tableaux en tout dans le spectacle.
Ma chanson d'accueil avance bien, la manipulation de Gavroche ma parait de plus en plus simple (en tous cas, ça ne me fait plus mal), les Thénardier prennent de l'ampleur, mon personnage d'Eugénie se dessine plus précisément... On trouve de chouettes idées pour le décor. François (de la Manivelle) nous a fait des retours qui nous aide dans la réflexion sur le décor. Merci!
Nous avons même fait une minusculi présentation d 'un bout de vie de Gavroche dans la rue devant toute l'équipe réunie. ..
Le décor ainsi que toutes les marionnettes seront terminées en février 2020. Je suis contente car j'ai du temps en janvier, ça signifie que je pourrai aussi y mettre les mains dedans....
Au niveau du sens de tout ça, je suis de plus en plus convaincue. Je ne lâche rien comme on dit, et Victor Hugo est toujours à mes côtés (ça va, il ne prend pas trop de place).
Je me sens forte et tellement bien accompagnée. Je commence à rêver de la lumière, de la musique qui habilleront le spectacle. J'ai hâte de commencer les sensibilisations aussi. En novembre, on rencontre une institutrice à Moulins.
La suite? Nous serons à la maison de folie de Moulins semaine prochaine et encore 4 jours en novembre. Puis, à Moulins février (étape de travail devant une classe j'espère), et puis en mars à Bruay, en avril à Tournai etc etc.
Finir les marionnettes. Le décor. Jouer de l'accordéon. Manipuler et faire jouer sa voix....Continuer d'alimenter la flamme qui nous anime... y ajouter de la musique. Rêver en grand, y mettre des paillettes d'espoir et de folie joyeuse. y ajouter de la lumière. Espérer obtenir la demande d'aide à la création de la FWD. (le dossier a été durement travaillé et rendu en temps et en heure: on en est pas peu fier! Merci, o combien ,MERCI pour les lettres de soutien!)
Les premières sont le 16, 17 octobre 2020 à la Maison de folie de Moulins. (je suis trop contente...)
Je te joins une petite photo (de très mauvais qualité) de Gavroche qui n'est pas terminé...Sa bouche s'ouvre et il a un système d'articulation pour les jambes. C'est à dire qu'il marche vraiment.
Je te souhaite une belle journée avec..."sunny" parce qu'on en a bien besoin....
Cordialement,
Lucie Jacquemart pour la cie du Bonjour